Divers sur l'or

L’histoire de l’orpaillage en Ariège jusqu’à nos jours

L’orpaillage en Ariège de l’antiquité à nos jours : Orpailleur d’un jour, Orpailleurs de toujours. Car l’or en Ariège à toujours existé, la présence des orpailleurs également.

L’or, une histoire qui débute avec celle de notre planète

A la fois répandu sur la terre et dans les mers, mais prodigieusement disséminé, l’or est finalement rare.
Remarquablement malléable et ductile, c’est un métal magique qui brille dans l’histoire de l’homme. Il y a 11000 ans, en cheminant le long des rivières il est déjà fasciné par ces lourdes pierres qui scintillent.

Mais c’est au néolithique (-5000 à –2500 ans avant J.C), que l’homme remarque parmi d’autres une pépite plus grosse et plus éclatante. Il la ramasse, l’admire, la soupèse, la martèle ; et par hasard commence une ère nouvelle: l’âge des métaux.

L’or, en principe, ne sert à rien, car il est trop mou, à l’état pur, pour forger des instruments de vie ou de mort. Sa  qualité est subjective : il est juste beau à regarder.

En France, les premiers objets en or apparaissent dans des milieux culturels de la fin du néolithique et à l’âge du cuivre (chalcolithique), soit à partir d’environ 2500 ans avant notre ère. Mais ce n’est qu’à partir de l’âge du Bronze ancien (1900 – 1500 av J.C) que l’extraction de l’or prend une réelle importance.

Les échanges et les migrations pendant cette période permettent l’usage et la présence d’objets en or dans des régions qui ne possèdent aucun gisement des métal précieux.

Aussi, c’est seulement à partir de l’époque gauloise et gallo-romaine que l’on trouve une exploitation aurifère active dans notre pays. La Gaule fut pour les romains une grande source d’or, absolument comme le Mexique et le Pérou pour les hommes de la Renaissance.

rampe de lavage pour trouver de l'or en ariège

Sur les traces du passé

Dans le paysage, de toutes les industries anciennes, ce sont les entreprises extractives qui ont laissé le plus de traces dans les paysages et cela depuis l’époque protohistorique. Mais en ce qui en concerne l’orpaillage, la médiocrité des moyens techniques d’exploitation, qui s’apparentaient plus à la cueillette, et entraient dans les calendriers des travaux ruraux, n’a laissé aucune ou peu de traces au cours des âges.

Les textes antiques, quant à eux, tout en soulignant la richesse de la Gaule ‘’ en métaux de toutes sortes ‘’, ne sont sous d’aucun secours pour la localisation géographique des zones d’extraction.

Par contre, les sources écrites abondent à, partir du XVème siècle. En effet, les métaux précieux ont suscité de tout temps in vif intérêt des pouvoirs publics.
Plusieurs édits et arrêts du Conseil, rendus depuis Louis XI jusqu’à Louis XIV, concernant l’art d’auriers, arpailleurs, cueilleurs de palioles d’or, établissent que sous ces règnes la France tirait par ce moyens une quantité d’or considérable, surtout dans le Languedoc.

“La Gallia Aurifera”
Pour la majorité de nos concitoyens, parler de chercheurs d’or évoque aussitôt la Californie et le ruée vers l’or de 1846. Mais, comme en témoignent les historiens et géographes anciens l’orpaillage était très productif à l’époque antique et il semble avoir été pratiqué sur tous les réseaux hydrographiques aurifères des Pyrénées et d’autres massifs.

L’un des premiers à évoquer l’or de la Gaule fut :
• Théophraste, philosophe grec, (371 à 287 av JC) signale les mines gauloise d’or et d’argent

• Possidonios, philosophe grec, ( 135 à 50 av JC)  affirme que les Volques Tectosages, dont la domination s’étendait jusqu’aux Pyrénées, exploitèrent les premières mines d’or de ces montagnes.

• Strabon, géographe grec, (-58  à 21 après JC) prétendait que les Pyrénées et les Cévennes renfermaient des mines d’or. Il ajoute que la source des richesses de volques tectosages  était dans leur pays même car  “ils habitent une terre fertile en or…
Dans un autre passage, il parle de la région d’aquitaine occupés par les Tarbellis: “ce peuple possède d’importantes mines d’or, car il suffit d’y creuser des puits peu profonds pour trouver des lames d’or épaisses et qui ne nécessitent qu’un léger lavage. Mais en général, c’est sous la forme de paillettes et de pépites que l’or s’y présente et il n’exige qu’un travail facile d’affinage…”

• Diodore de Sicile, historien grec, (-45 à 20 après. JC), décrit un orpaillage productif « …les phéniciens et les carthaginois trouvérent tant d’or dans les Pyrénées qu’ils en mirent aux ancres de leurs vaisseaux… »
il ajoutait : “dans la Galatie (Gaule) l’argent manque totalement –(ce qui est inexact)- mais il y a beaucoup d’or : la nature le fournit aux gens sans qu’ils aient à fouiller avec difficulté ».
Les fleuves dans leurs cours font des coudes, ils se heurtent aux contreforts des montagnes voisines. Les eaux arrachent et charrient avec elles des fragments de roche et de terre remplis de parcelles d’or.
Ceux qui sont occupés à ces travaux concassent les mottes par des lavages et livrent le résidu métallique au creuset du fondeur pour en faire des objets de parure
…”

L’or gaulois était donc connu du monde antique et la «Gallia aurifera» est souvent citée par ces auteur anciens,  ce qui éveilla la convoitise Romaine.

• Pline l’ancien, naturaliste auteur latin, (23 à 79 après. JC),qui fut gouverneur des provinces d’Espagne confirme la richesse en or de la Gaule décrite par Diodore de Sicile.
• Plutarque, polygraphe grec, (48/50 à 120 après. JC), disait de Jules César qu’il avait conquit la Gaule avec le fer des romains et asservi la république romaine avec l’or des Gaulois.
• Ausone, en 1575, place le Tarn dans le nombre des fleuves aurifères “Aurifèrum posponet Gallia tarnem”
• Sidoine Appolinaire, à son tour, célébrait au cinquième siècle, les paillettes d’or que roule le Tarn: “meminit et tarnis fluvi auriferi”

On n’ignore pas, en effet que nos aïeux extrayaient de l’or de diverses rivières, telles que: le Ceze, le Gagneres et le Gardon (Gard) ; la Garonne ; le Tarn, le Viaur, l’Agout et l’Orival (Tarn) ;l’Hérault et l’Orb (Hérault) ;le Tech et la Têt (Pyrénées Orientales ; l’Aude, l’Orbiel et l’Orbieu (Aude) ;le Salat et l’Ariège (Ariège) …

Qui ne sait que l’Ariège roule de l’or et qu’elle en roule encore?

En parcourant, au XIX ème siècle, la vallée de l’Ariège on rencontrait souvent à demi plongés dans l’eau, des hommes occupés à remplir, avec du gravier et du sable de larges vases en bois nommés grésales, c’étaient des chercheurs d’or.

On racontait naguère que dans la vallée d’Orlu, à la naissance de l’Oriège, au lieu-dit Pic de Baxouillade, les bergers plaçaient dans les torrents des toisons d’agneaux afin de recueillir paillettes et particules d’or, puis qu’ils allaient vendre à Ax ou à Tarascon.

Aujourd’hui encore, notre pays fournit assez de parcelles de métal précieux. Depuis les années 1970-80, de nouveaux prospecteurs utilisent non plus la grésale de bois, mais la battée métallique ou plastique, mais aussi des moyens mécaniques bien mieux adaptés.
Quelques uns d’entre eux, dans les années 1980-1990, trouveront cette activité assez lucrative pour pouvoir alors en vivre.
Aussi, en modernisant un vieil adage en partie périmé, on pourrait dire que  “l’Ariège produit toujours des hommes… et de l’or

L’orpaillage, un patrimoine ariégeois

En effet, une foule d’étymologies et de traditions s’accordent à nous représenter les rivières de notre pays comme charriant de l’or, et comme ayant donné lieu, anciennement, à des exploitations assez considérables.

Le non d’Aurigera (la porteuse d’or) pour dénommer la rivière Ariège est connue dès 1540 dans l’histoire du Comté de Foix de Bertrand Hélie.
Ce qui coïncide avec la frénésie qui jeta notre région, à partir du XVème siècle dans la recherche des métaux.

En 1618, Papyre Masson dans sa description des fleuves de la Gaule n’hésite pas:  «…Aurigera fluvius pyrenaerum mobilismus dicit potest qui ab auro gerendo aureum nomen habet…»
En 1609, Pierre Olhagaray, dans la préface de l’histoire de Foix Béarn et Navarre écrit:
«…de l’Auriège et l’Arget rivières aux bords dorés et argentés ? cela ne Fait-il pas foy des trésors cachés dans l’amary de ces noms …»

En 1610, Du Bartas, poète gascon, dans le sonnet III des neufs muses des Pyrénées: « …fleuve d’or et de flot et de nom et de sable… plus riche que pactol, plus que le Nil fécond… »

En 1718 , René de Réaumur , surnommé le «Pline du XVIII°» qui avait signalé à l’attention des savant que notre rivière «charieuse de paillettes» faisait que «les Ariégeois dorment sur des trésors et il ajoutait de l’Ariège …c’est à la fois une Suisse pittoresque et un Eldorado inconnu»

L’or est-il une chimère en Ariège?

paillettes d'or dans une batée trouvé en ariège

Les auteurs de la Renaissance, selon François Baby, n’ont put résister à un appel doré de l’imaginaire, ils changèrent avec élan l’étymologie du mot Ariège. D’ailleurs, l’influence de Aurigera,  sur Ariège s’est exercée de façon fragile et provisoire.

Nous trouvons, en effet, dès 870 de notre ère, fluvium Arega  avec une ancienne racine hydronimique –ar- (cours d’eau), et ainsi de nombreuses autres attestations jusqu’au XVème siècle et après.

Certes, l’âge d’or de l’orpaillage ariégeois n’est plus qu’un souvenir. Sa réelle importance économique est très discutable. C’était, tout au plus, une activité saisonnière et complémentaire.
Bien que la réalité des sables aurifères charriés par l’Ariège et ses affluents, elle, est indiscutable.

Le XVIIIème siècle nous livre à ce propos un nombre considérable de mémoires techniques:
Dandrezet et Reaumur (1718), Charles Rollin (1738), Gardeil (1758), Guettard (1762), De Dietrich (1786) qui affirme que «l’Ariège est sans contredit une des rivières de l’Europe qui fournit le plus d’or».

L’âge d’or de l’orpaillage en Ariège

Si, sous les Comtes de Foix la récolte de l’or était très répandue. Une permission de 1476 permet à tous les habitants de la province de recueillir  l’or de paillole sans aucune charge et condition, sans préjudice du droit des seigneurs à qui appartiennent les rivières.

A Pamiers , chercher et recueillir l’or de l’Ariège était un des privilèges les plus précieux de la communauté qui le revendiquait et le défendait devant le conseil de ville en 1477 il fut décidé que l’on autoriserait les habitants mais que l’on défendrait à tout étranger de chercher de l’or sous peine de 60 sols d’amende
Ce privilège fut pendant longtemps un honneur et les habitants de Pamiers s’en montraient très jaloux.

C’était ce même conseil de ville, qui réglait les conditions de ce privilège d’abord sous les Comtes de Foix et  plus tard, lorsque le Comté fut uni à la couronne de France sous Henri IV. Et depuis, en vertu du haut domaine d’accorder ces patentes, il fut confisqué par l’Etat et pour l’Ariège et pour Pamiers, il fut attaché à l’hôtel des monnaies de Toulouse qui accordait ce privilège au nom du roi.

Orpaïllaïre, Cassaïre, Pescaïre: Pecaire!
La cueillette la plus ordinaire se faisait à Pamiers qui était le centre de la zone aurifère allant de Varilhes à Saverdun.

«Les paysans s’en occupent, lorsque les travaux rustiques leur en laissent le loisir. Sinon ils y emploient leurs enfants avant que leur âge et leurs forces leur permettent des ouvrages pénibles…»

Un proverbe médiéval du XIIème siècle plaçait les orpailleurs parmi les pauvres avec les chasseurs et les pêcheurs.

Les profits de cette cueillette ne sont pas bien considérables. Il est prétendu qu’avec toute l’assiduité possible, elle ne peut se porter au-delà de douze sous par jour (année 1780).
Encore même faut-il que les crues d’eau aient abattu beaucoup des terres.

Malgré cela, ces pauvres gens regardent cette recherche comme une ressource infaillible pour eux lorsque les récoltes manquent, cette cueillette les aide à vivre et à payer leurs charges et impositions.

Il est à noter que les paysans ne sont pas les seuls qui s’adonnent à la cueillette des pailloles d’or.
Il y a même des bourgeois et des familles entières qui y trouvent un objet de ressource.

Cette profession fut totalement discréditée, voici l’observation faite par un intendant de la province au cours de l’année 1780, au sujet de la liberté de cueillir des pailloles d’or: «…pourquoi priver d’ailleurs la partie la plus indigente et la plus laborieuse de la contrée –basse Ariège- d’un léger avantage que la nature paraît lui offrir…»

Dans un mémoire de 1738, Charles Rollin indique que «à la vérité les récoltes qu’on y fait ne sont pas considérables, et suffisent à peine pour faire vivre pendant quelques mois les paysans qui s’occupent à ce travail»

L’intendant Ardouin-Dumazet, écrivait d’ailleurs vers la fin du XVIIIème: «…l’or que charrie la rivière d’Oriège qui coule en cette contrée, n’a jamais dédommagé des peines de la recherche, a formé beaucoup de fainéants, a nui même aux propriétaires riverains»

Si Réaumur , assure en 1718 que l’or fait vivre quelques mois les paysans Ariégeois, Lahondés, jure que les orpailleurs «ne se recrutaient guère que parmi les gens dénués de ressources et sans aveu…»

Le conseil de ville de Pamiers présenta une requête à la Monnaie de Toulouse en mai 1784, pour ne donner la commission de chercheur d’or qu’à des gens de bonne vie et mœurs, allivrés et capités dans la ville, âgés de vingt cinq ans, auxquels il serait interdit de dégrader les terres.

La Cour des Monnaies
L’or des Hôtels des Monnaies provenait essentiellement du recyclage et de l’orpaillage.

La Cour des monnaies de Toulouse paraît être des longtemps en possession de la juridiction de la police des orpailleurs, elle y a été maintenue par l’arrêt du conseil d’état du Roi Louis XV , du neuf novembre 1751.

Sous le régime des patentes ou permissions, l’orpailleur avait la faculté de choisir son terrain et de l’exploiter sans l’agrément du propriétaire, sauf de remettre le sol dans son état primitif et suivant le cas payer les dégâts occasionnés.

Malgré l’arrêt du conseil du 09 janvier 1751, la remise de la cueillette à la monnaie n’excède pas la dixième partie de l’or qui se ramasse parce que des marchants ambulants sillonnent continuellement les rivières pour acheter aux cueilleurs leur produit journalier.

Et ces paysans sont heureux de trouver des gens à portée de leur résidence qui leur achètent l’or qu’ils recueillent, à cause de leur éloignement de la Monnaie.
Pour remédier à cet inconvénient, il fut donc établi un inspecteur sur cette cueillette qui connaissait parfaitement les rivières, ruisseaux et les villages voisins aux lieux de cette cueillette afin d’y établir des bureaux de change.

L’hôtel de la Monnaie de Toulouse affermait ou achetait les terrains réputés les plus riches et les faisait exploiter directement pour le compte de l’état.Il avait alors seul le droit de fondre l’or apporté par les orpailleurs. Par la suite de la baisse des prix à l’achat les orpailleurs vendirent en contrebande aux espagnols le produit de leur cueillette.
Aussi, la clause de remettre tout l’or au change de la Monnaie, ne sera plus observée après l’arrêt du Conseil d’état du 07 octobre 1755, qui a rendu l’or marchand.

rampe de lavage pour trouver de l'or sur le salat

Une industrie en déclin

Le coup de grâce sur cette profession fut portée par la révolution. Les permissions royales n’ayant plus aucune valeur, l’usage tomba en désuétude et la profession fut entièrement libre.

Pendant cette période de liberté, selon le baron De Dietrich: «…les orpailleurs éprouvèrent dans leur travail de grandes contrariétés…»
En effet, l’arrêt de 1751 qui défend à tout seigneur, propriétaire de terrain de troubler les porteurs de permissions dans leur cueillette était si peu observé, que les dits propriétaires chassèrent violemment les orpailleurs, de manière que les meilleurs endroits  leur furent interdits.

Les propriétaires écartèrent les orpailleurs de leur rivages pour y faire parfois eux-même la cueillette, en partageant l’or avec les malheureux qu’ils emploient à cette recherche.
On ne laissa donc au pauvre paysan que le soin de recueillir des particules de sable doré dont la cueillette ne récompensait pas les peines qu’il prenait à cet effet.
Aussi, soutenu par l’espérance d’une heureuse pêche, il travaillera à cette récolte avec une grande ardeur.

Jusqu’à la loi de  1810, date de promulgation de la loi sur les mines et carrières, l’orpailleur travaillait sous le régime des patentes royales. Cette loi supprima les patentes, l’autorisation des propriétaires riverains des cours d’eau aurifères fut alors nécessaires et bon nombre de chercheurs d’or furent alors chassés.
D’après Jules François, ingénieur des mines, et ce n’est que vers 1812 – 1815 que cette industrie a à peu près cessé.

La fièvre aurifère est tombé au second empire dans notre département

Ce n’est point que les paillettes avaient disparu, mais la valeur réelle de ce métal avait considérablement diminué depuis la découverte du nouveau monde.

On rencontrera encore à l’aube du 20ème  siècle quelques orpailleurs sur les bords du Salat et de l’Ariège. L’un des derniers représentant de cette profession s’est d’ailleurs éteint en 1892 à Pamiers.

Il s’agit de Joseph Delfour, orpailleur de naissance peut-on dire, puisqu’il était d’une famille, d’un clan ou cette activité avec ses secrets et sa technique de prospection s’était transmise de père en fils depuis plusieurs générations.
L’or fut laissé dans son sable, dans l’attente de nouveaux prospecteurs.

Le Pactole Ariégeois

Un intendant de la province écrivait en 1751: «…qu’on avait anciennement plus d’attention à cette cueillette…»

Puisqu’on trouve à la cour des monnaies plusieurs règlements à ce sujet, notamment celui du Roi Charles VIII du 23 mai 1472, dans lequel on voit qu’il entrait de cet or chaque année cinq à six cent marcs aux monnaies de Toulouse et de Montpellier.

Il nous est difficile de connaître avec précision la production aurifère et le seul document qui atteste de cette production est la correspondance de Monsieur Pailhes, changeur de la monnaie au bureau de Pamiers.
Celui-ci nous dit qu’avant 1750 la monnaie de Toulouse recevait jusqu’à 200 marcs (environs 50 kg) d’or par an ramassés dans l’Ariège, la Garonne et le Salat.

Et que depuis 1750 jusqu’en 1761, il fut apporté au bureau de Pamiers 80 marcs (20 Kg) d’or. Ceci est sans compter de la contrebande  florissante  à cause du bas prix auquel on payait l’or aux orpailleurs: étrangers et colporteurs achetaient tous les jours de l’or aux habitants avant qu’il ne soit remis au dit bureau. Le change fut abaissé de 86 livres à 72 livres l’once (30,59 g) de pailloles.

D’après Dietrich: «…les orpailleurs vendent l’once des ces paillettes 80 livres, ils gagnent les temps ordinaires 20 à 30 sols par jour et lorsque les eaux sont hautes, ce travail leur produit couramment 6 francs par jour…»

Un mémoire sur la cueillette des pailloles d’or en 1751, nous apprend que le titre de l’or récolté était à 22 et 23 carats. C’était donc un produit excellent, l’or pur étant à 24 carats de fin.
La quantité d’or récolté après la l’arrêt du conseil – qui a rendu l’or marchand- de 1755, n’est pas connue.

Si le lavage est aujourd’hui en partie abandonné il faut l’attribuer non à la disparition et à l’appauvrissement des alluvions, mais d’une part, à l’exiguïté du bénéfice, et d’autre part, à l’augmentation de la main d’œuvre.
En outre, l’entretien et la mise en culture des berges des rivières et des ruisseaux, a considérablement diminué le bénéfice résultant du lavage.

L’art de l’orpailleur

«…les ramasseurs d’or de l’Ariège, du Salat et de la Garonne sont les plus adroits de l’univers…» Guettard d’après Pailhès.

Monsieur Pailhes décrit d’ailleurs les orpailleurs Ariégeois comme rusés et fort habiles à trouver les gros grains dans les petits ruisseaux et les rigoles de Bénagues et Varilhes, après les crues, à l’aide de simples sébilles de bois.

D’après Diodore de Sicile: «les gens qui s’occupent de ce genre de travail brisent et mettent en bouillie les mottes de terre qui contiennent les grains d’or ensuite, cette bouillie lavée dans l’eau est mise en fusion par des fourneaux…»

La principale partie du travail de l’orpailleur consiste donc à un grand nombres de lavages, ceci afin de dégager les paillettes d’or du sable.
Ce lavage est un procédé gravimétrique, qui est fondé sur la différence de densité qui existe entre le minerais et la gangue (argile + sable) dans un milieu liquide.

Très rudimentaire, cette technique a très peu évoluée au cours des âges et elle reste fondamentale en prospection alluviale encore aujourd’hui. La méthode la plus usité et ceci dès l’aube des temps est le lavage au vase, appelé sébille, gréssale, grésanne ou grasaléto, simple  déclinaison de la batée actuelle.

Cette batée était une sorte de vase en bois à bords évasés d’environs 50 centimètres de diamètre.
Duran et L.H. Destel écrivent qu’à Orlu (Haute Ariège) comme en Bellongue dans le Couserans, «…on raconte l’histoire de ces bergers qui plaçaient dans des fontaines des toisons sur les lesquelles se fixaient des paillettes qu’ils allaient ensuite vendre à la ville»

L’orpailleur Ariégeois  utilisait deux autres outils:

rampe de lavage pour trouver de l'or sur le salat en ariège
  • Un bêche “l’andusa”, à bords relevés, de 25 cm de long sur 20 cm de large. Cette bêche lui servait à écarter les cailloux et à priser le sable et le menu gravier jusqu’à une partie plus ferme de sous-sol appelée la “la balmo”.
  • Une petite écuelle en bois, “la scudelle” de 10 cm de diamètre, ou l’on verse le sable lavé.

Le sable et le gravier étaient mis dans la sébile ; et pieds nus, la chemise retroussée, les deux mains sur la batée ils entraient dans la rivière.
D’une main, l’orpailleur procédait au débourbage de la matière, opération indispensable avant tout lavage ce qui a pour but de d’éliminer les particules légères et les grosses pierres.

En frappant la surface de l’eau de sa batée, il reconcentrait le contenu de façon à faire tomber les particules lourdes au fond du cône de la batée, toujours dans l’eau, puis commençait l’opération la plus délicate.

Saisissant la batée des deux mains, il imprimait à son contenu un lent mouvement de rotation. Il inclinait le bord de sa batée et l’eau se s’épanchant entraînait le sable et le gravier. Il diminuait ainsi la masse des matières inutiles.

Pendant que cette opération très artistique s’exécute, on voit le sable changer de nuance et de gris-marron devenir noir. C’est le sable lourd aurifère proprement dit, que l’on retrouve donc au fond de la sébile.

Ensuite il recueille ce sable riche en précieuses parcelles d’or dans la scudelle. Il y a quelque fois dans ces sables des paillettes assez grosses pour alors êtres prises à la main.
Ensuite l’orpailleur enlève l’eau que contient ce sable et conserve sur lui la petite écuelle.

Après une dure journée de travail, il combine ces sables avec du mercure pour en faire un amalgame d’or.
Puis il se devait de chauffer cet amalgame, le mercure était perdu et il recueillait l’or.

D’après le chanoine Barbier: «l’orpailleur qui traitait le sable aurifère par le mercure réalisait encore d’excellentes journées»

La seconde méthode, plus perfectionnée, consistait à utiliser la table à laver.
Pour l’Ariège, De Dietrich déplore le peu d’usage qu’il est fait en ces lieux de tables de lavage et surtout l’absence de crible.

Cette table à laver est une sorte de caisse ouverte et inclinée, elle était recouverte de toile grossière (parfois de toison) sur une partie de sa longueur et munie de traverses ou de rainures.
Assez souvent, on commence par cribler le sable qu’on laisse tomber à la partie supérieure de la dite table qu’un courant d’eau traverse.

Il suffisait de remuer constamment le sable avec un simple balai de façon à entraîner les particules d’or qui allaient se déposer sur les fibres du tissu.
En fin de journée on retirait la toile et on décantait le sable aurifère dans un bac ou ensuite il était amalgamé.

Mais si le principe de la toison et de la table à laver est d’un usage très ancien et selon Daubrée, est très employée sur les bords du Rhin. D’après Dietrich, qui a très bien décrit toutes ces diverses méthodes, elle n’a pas eu un grand succès auprès des orpailleurs Ariégeois. D’ailleurs ce dernier les incite à utiliser beaucoup plus ce procédé.

En avril 1860, un nommé Jean Laforgue, mécanicien à Saint-Girons dépose un brevet d’invention pour 15 années, d’une machine dite : laveuse, destinée au lavage des sables aurifères , assez proche des sluices actuels.
Les croquis de cette machine ressemblent étrangement aux gravures des tables à laver décrites dans le célèbre traité de Georges Agricola «De Re Metallica» en 1556.

Les endroits ou trouver de l’or en Ariège

L’or est disséminé partout et les orpailleurs qui connaissent les points privilégiés leur donnent le non de places ou placier (placer en anglais).

Les placers ont été appelés minerais du pauvre parce qu’ils consistent en sables ou en graviers accumulés en surface et facilement exploitables avec un équipement minimum.
D’après R.Lizop: «…les placers étaient plus nombreux et plus riches, et que les Tectosages les ont largement exploités»

Ces placers étaient irrégulièrement disséminés, lorsque la rivière dans ses crues les mettaient au jour: l’aspect, la nuance du gravier guidaient l’orpailleur ainsi que sa propre expérience.
Les orpailleurs s’établissent aux endroits où ils rencontrent des particules de minerais de fer dont la densité se rapproche le plus de celle des paillettes d’or.

D’après Guettard: «Après les crues, les orpailleurs courent en foule au pied des terres aurifères qu’ils connaissent parfaitement»

 Il existe donc, le long des cours d’eau des endroits favorables où le courant laisse plus facilement tomber sa cargaison de parcelles précieuses et lui permet de s’accumuler.
Les orpailleurs dit Dietrich: «cherchent communément les pailloles d’or dans les petites anses et ils sont certains d’en trouver dans les endroits ou le graviers contiennent des galets de mine de fer»
Il ajoute que ces galets de mine de fer servent d’indices, que d’ailleurs les orpailleurs des Cévennes les nomment  la mère de l’or.

Antoine de Réaumur, écrit que les orpailleurs recherchent les parties de rivière ou le courant est ralenti, comme par exemple les coudes ou les élargissements. Donc le courant amplifié lors des crues détache le sable aurifère et le transporte, lorsqu’il se trouve ralenti ou freiné il se dépose en bancs d’alluvions enrichies.

Comme dans tous les pays où l’on lave les sables aurifères, les cueilleurs de pailloles de l’Ariège se son vite rendu compte que la récolte était plus profitable après les crues et les fortes pluies.
Dans les Cévennes, écrit Dietrich, «les paysans couvrent de peaux de mouton les chaussées des moulins lorsqu’ils prévoient des crues d’eau…»

Il s’avère aussi que les orpailleurs n’attendent pas les débordements naturels , et ils détachent le sable et le gravier des berges ce qui occasionne d’ailleurs des conflits et des procès avec les propriétaires des terres.
Il existe donc des époques plus favorables à cette récolte de telle sorte que le lendemain d’un orage, l’orpailleur peut recueillir de nouveau de l’or à l’endroit d’où la veille il l’avait retiré.

Géographie des placers

La région aurifère la plus exploitable etait Pamiers pour centre. Mais l’essentiel de cette cueillette avait son siège dans les plaines du bas Salat et de la basse Ariège. Les anciens placers toujours d’après le Baron de Dietrich, sont:
L’Ariège devient aurifère du côté de Crampagna.
Le village de Varilhes sert ordinairement de terme aux excursions des orpailleurs de la ville de Pamiers.

Dans Pamiers, d’après Guettard: «…le sous-sol de la ville recèle de l’or aussi bien dans la partie haute que dans la partie basse, on en a trouvé parfois dans les fondations…».
On a effectivement acheté et affermé à plusieurs reprises, aux environs de Pamiers, des vignes et des près, pour en laver l’or. L’on renouvelle dans le comté de Foix l’histoire faite en Hongrie, de l’or végétant autour d’un cep de vigne.

Les endroits les plus productifs étaient les rivages de la plaine de Bénagues, Guillot, Longpré, la rive de Cailloup…
Dans l’étendue du pays, contenue entre Crampagna et Saverdun (+ 20km), tous les affluents rive gauche charrient des paillettes d’or. Citons par exemple les ruisseaux de Carol, l’artix, de loubens, le caubes, l’estrique…

Dans la vallée de la Lèze, les orpailleurs sont restés en aval de Pailhès et sur le Monesple.
L’Arize n’est vraiment aurifère qu’en aval de la Bastide de Sérou (rive droite).

Le Salat était surtout prospecté en aval de Saint-Girons, entre Prat-Bonrepaux et Roquefort ; de nombreux ruisseaux affluent rive droite sont aussi aurifères.
Comme l’Ariège, l’orpaillage sur le Salat est mentionné dès le XV ème siècle.

Antoine de Réaumur, écrit en 1718 que: «…l’or du Salat occupe pendant quelques temps de l’année des paysans -surtout des femmes- autour de Saint-Girons…»

Les lieux les plus avancés dans la montagne Ariégeoise où l’on ait lavé des sables aurifères, ceci après que les orpailleurs furent chassés des plaines par les propriétaires sont:
– la plaine d’Oust (région de Soueix, Couserans)
– la vallée du Vicdessos, sur la rivière de Siguer de 1800 à 1802, le ruisseau de Suc, et l’on a même tenté au XVIIIème siècle d’exploiter les alluvions du Bassin de Tarascon.

Tous ces lieux furent sûrement assez médiocres en production, car on trouve peu de sources écrites qui révèlent cette exploitation.
Enfin un dernier lieu d’orpaillage à citer est le confluent de l’Ariège et de la Garonne près de Portet-sur-Garonne.

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La Ruée vers l’Ariège

Comme chaque pays aurifère, l’Ariège a vécu aussi sa  ruée vers l’or.
En effet, après la découverte des gisements Californiens, la fièvre de l’or gagna aussi l’Ariège avec des prospecteurs venus de toutes parts.

De 1850 à 1938, le service des mines délivra une multitude de permis et autorisations de fouilles (+ 60) et quelques concessions furent exploitées.
Ces personnes avaient peu ou aucune pratique dans l’art des mines : pharmacien, mécanicien, avoué à la cour, inventeur, dessinateur, industriel, retraité… un ingénieur des mines, enfin !

Et bien sûr, tous virent de l’or partout !
On demanda même des renseignements à la préfecture afin de pouvoir pratiquer cette nouvelle profession en vogue.

On créa des sociétés de durée éphémère: la société des chercheurs d’or, la société des placers français…
Des industriels lyonnais, après l’achèvement du Canal de Suez, employèrent 2 dragues pour exploiter eux aussi les sables aurifères. Ils ouvrirent des tranchées énormes dans la plaine de Bénagues, mais le bénéfice fut médiocre et le projet fut abandonné.

Mais très vite, il ne subsista que quelques modestes recherches sur le Salat et l’Arize.
Malgré le renouveau des années 1970, il semble donc que rien de sérieux n’ait été fait et encore une fois on laissa l’or alluvionnaire dans son sable. Pourtant l’intérêt pour l’or des alluvions des cours d’eau d’Ariège n’est pas éteint…

Les vieux orpailleurs savaient qu’une malédiction suit le métal précieux: tout en créant la prospérité, il empoisonne la vie et tue l’esprit. «L’or est pour les âmes des hommes un poison», dit Shakespeare
Ceci est une autre histoire.

Enfin, aujourd’hui, le département de l’Ariège n’est-il pas plus fructueuse qu’à l’époque où les écuelles de bois de ses nombreux orpailleurs s’agitaient dans les rivières ?

Aspect législatif de l’orpaillage en Ariège

L’activité d’orpaillage amateur peut être considérée comme une activité minière. Elle peut être pratiquée en faisant une déclaration auprès de la DDT via un formulaire en ligne.

Source : article tiré de L’Histoire de l’Ariège de Claude Bostaire

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One thought on “L’histoire de l’orpaillage en Ariège jusqu’à nos jours

  • Bonjour, l’Ariège c’est bien mais il y en a jusqu’à dans les hautes Pyrénées. Il est possible d’en trouver à l’état de traces, mais cela ne mènera probablement pas à une exploitation rentable. Les guides et cartes géologiques indiquent que la région est surtout riche en plomb, manganèse, zinc et fer, qui ont tous été exploités depuis l’époque préromaine jusqu’à la fin du XIXème siècle. Bien qu’il y ait encore des filons, leur exploitation ne serait pas économiquement viable.

    En ce qui concerne les autres minéraux, les cartes géologiques peuvent être utiles pour repérer des sites d’intérêt. Par exemple, près du lac bleu, on peut trouver de la pyrite qui ressemble à de l’or mais qui est en réalité du fer et du soufre. Il y aurait également du grenat à proximité du lac bleu, près du chemin qui monte au col de Bareilles.

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